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La gare du Nord (1861-1866)

Place de Roubaix (actuelle place Napoléon-III)

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Embarcadère du chemin de fer du Nord

(in : E. Guinot, Itinéraire du chemin de fer de Paris à Bruxelles, Paris, 1853, p. 1)

C’est en vertu d’une loi votée en 1842, relative à l’établissement des grandes lignes de chemin de fer en France, que fut décidée la nouvelle ligne reliant Paris à la frontière belge. Inauguré le 14 juin 1846, l’embarcadère du Nord s’ajoutait aux premières gares ferroviaires de la capitale : l’embarcadère de l’Europe (gare Saint-Lazare), ouvert en 1837, ceux de la barrière du Maine (gare Montparnasse) et d’Orléans (gare d’Austerlitz), ouverts en 1840.

Dès 1847, on constata toutefois l’insuffisance du bâtiment doté seulement de deux voies, si bien qu’il fut en partie démoli, en 1860, et sa façade principale, remontée, avec quelques transformations, à Lille, où elle signale aujourd’hui la gare de Lille-Flandres.

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Vue extérieure de la nouvelle gare du chemin de fer du Nord – Dessin de Thérond (1866)

Le baron James de Rothschild, président de la Compagnie des Chemins de fer du Nord, confia la construction d’une nouvelle gare à l’architecte Jacques-Ignace Hittorff. Celui-ci choisit l’association de façades en pierres de taille avec une ossature en fer et en fonte. Il donna au bâtiment une forme de « U », plan habituel pour une gare terminus.

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La façade principale de la gare du Nord

La façade principale de la gare imaginée par Hittorff s’articule autour d’un pavillon central formant un arc de triomphe, relié par deux ailes à des pavillons latéraux plus petits. De style néo-corinthien, la façade de la gare du Nord reformule l’architecture gréco-romaine : elle reçoit un portique à colonnes doriques au rez-de-chaussée, qui donne accès aux vestibules, et un splendide décor de pilastres cannelés à chapiteau ionique, groupés deux à deux et embrassant plusieurs niveaux, destiné à mettre en valeur les baies vitrées des pavillons.

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Pierre-Jules Cavelier (1814-1894)

Paris, vers 1864-65, Paris, façade principale de la gare du Nord

Vingt-trois statues représentant les villes desservies par la Compagnie de Chemin de fer du Nord ornent la façade. La statue symbolisant Paris domine le pavillon central, dont la verrière à carcasse métallique présente, en plus d’une horloge à cadran circulaire, les figures des grandes villes du nord de la France.

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Pierre-Jules Cavelier (1814-1894)

Compiègne, 1867, Paris, clair-étage du pavillon latéral gauche de la façade principale de la gare du Nord

Parmi celles-ci, la figure allégorique symbolisant la ville de Compiègne est, à l’exemple de ses voisines, une femme en toge, coiffée d’une tour crénelée. Elle appuie la main droite contre sa hanche et pose la main gauche sur un grand bouclier frappé d’un écusson orné d’un lion héraldique portant la couronne impériale.

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Huit autres statues, représentant les grandes villes européennes, se dressent sur les entablements du pavillon central, au milieu et à la pointe inférieure des rampants du fronton couronnant la façade. A l’angle gauche, Charles Gumery a sculpté la figure féminine incarnant la ville d’Amsterdam et Gabriel-Jules Thomas, celle incarnant Francfort (reproduites à gauche). A l’angle droit, Jean-Joseph Perraud a conçu la statue représentant Berlin et Mathurin Moreau, celle de la ville de Cologne (reproduites à droite).

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La halle métallique et sa verrière de clôture

Le portique du rez-de-chaussée donne accès à un vestibule d’entrée qui débouche sur le quai transversal, où aboutissent les voies et les quais longitudinaux. Deux clôtures de pierre, percées de demi-lunes vitrées à l’étage et constituées d’un portique décoré de pilastres en légère saillie, séparent la grande halle métallique de ses voisines, qui sont moins larges et moins hautes. Les pilastres de ces clôtures reçoivent des fermes métalliques, qui s’élèvent jusqu’aux poutres transversales de la toiture.

Le grand tableau des arrivées fermait la petite halle, à l’ouest, alors que le tableau des départs s’insérait dans la clôture de pierre de la grande halle. Depuis 2015, ces deux tableaux à palettes ont été remplacés par de petits écrans numériques qui ponctuent le quai transversal. Les usagers sont désormais privés du cliquetis très particulier des palettes.

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Le détail de la verrière de clôture

Au revers de la façade, la passerelle de commandement permettait d’appréhender facilement le départ et l’arrivée des trains. Depuis l’ouverture du Tunnel sous la Manche, en direction de Londres, une mezzanine, réservée aux voyageurs empruntant l’Eurostar, a été ajoutée. De là, les voyageurs peuvent contempler la grande halle métallique et sa surprenante verrière de clôture, qui surplombent les quais longitudinaux.

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Les colonnes de fonte de la halle (ici, celles du quai transversal)

Deux rangs de colonnes en fonte très élancées et décorées de motifs végétaux, à chapiteau composite, supportent également la grande halle, à mi-hauteur de sa toiture. Ces colonnes supportent des fermes « Polonceau » sur lesquelles s’appuient les poutres transversales renforçant la toiture.  

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Le pavillon central de la façade principale

Dès l’achèvement de la nouvelle gare conçue par Hittorff, Le Magasin pittoresque fait part de son admiration :

« La nouvelle gare du Nord est de beaucoup le plus vaste édifice de ce genre que possède aujourd’hui Paris. L’espace étroit où elle se développe la grandit encore. On ne la voit pas de loin, comme sa voisine la gare de l’est ; elle n’embellit point la perspective d’une immense voie. Mais quand on suit d’orient en occident le boulevard Magenta, la rue oblique de Saint-Quentin en laisse apercevoir l’extrême droite, et il faut marcher quelques minutes encore avant de se trouver en face du fronton central. Une rue courte et d’une largeur insuffisante la sépare du boulevard. La façade, qui occupe tout le fond de la place de Roubaix, est plus longue à elle toute seule que la grande nef et le chœur de Notre-Dame ; elle ne mesure pas moins de cent cinquante mètres. A droite et çà gauche s’étendent de grandes cours bordées par les bâtiments du service et de l’administration. Le plan de l’édifice présente un quadrilatère d’environ 165 mètres sur 199, donnant une superficie de 32 000 mètres. Il comporte cinq parties principales, qui sont directement exprimées dans la façade : au milieu, la grande halle où arrivent et d’où partent les trains ; à gauche, les salles de départ, puis la salle des Pas-Perdus ; à droite, les salles d’arrivée et des remises couvertes.

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Le décor sculpté de la gare du Nord, vu depuis la rue de Dunkerque

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

(…) Le grand mérite de la décoration extérieure est ici d’indiquer tout d’abord la destination de l’édifice. Quelque opinion qu’on en puisse avoir sous le rapport de l’art et de la beauté des lignes, il faut rendre à M. Hittorff cette justice, qu’il a bien compris cette loi fondamentale de l’architecture : l’appropriation d’un bâtiment à un usage déterminé. Il a voulu faire une gare, et il en a fait une : c’est là l’idée et le caractère dominant de son œuvre, ce que l’œil saisit du premier coup.

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La grande baie cintrée vitrée et les statues des principales villes du nord de la France

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

Il est impossible de ne pas deviner, derrière le grand fronton, la halle qu’il termine et qu’il éclaire. A ses extrémités se dessinent les entablements de doubles pilastres ioniques extérieurs aux pentes qu’ils appuient. Deux autres couples de pilastres plus élevés les soutiennent et les interrompent, de manière à en masquer la longueur inusitée. Cette disposition est d’ailleurs justifiée autrement que par la nécessité ; elle aide à masquer davantage les trois divisions de la halle, la partie destinée aux rails, et les larges trottoirs laissés aux voyageurs et au transport des bagages. Un arc central d’un très-grand rayon, et deux arcs latéraux d’une moindre courbure, éclairent la nef et les bas-côtés.

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Les pilastres accouplés flanquant la grande baie vitrée du pavillon central et l’un des médaillons représentant une tête de Neptune au trident

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

Au-dessous des vitrages, soutenus et divisés par de forts meneaux de pierre, règne un clair-étage décoré de dix statues de villes ; huit autres statues couronnent les huit pilastres ioniques, et un groupe colossal s’élève à l’angle du fronton. Quatre baies cintrées séparent les pilastres accouplés, et deux grands médaillons rachètent la différence de hauteur qui existe forcément entre les couples de pilastres médians et ceux où s’arrêtent les pentes du comble.

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Les oreillons ou acrotères (appelés « mascarons » dans l’article du Magasin pittoresque), aux angles des frontons couronnant les pavillons latéraux

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

Aux extrémités de la façade sont placés deux pavillons dont les frontons, d’une forme moins singulière, s’appuient aussi sur de grands pilastres, mais en recouvrent du moins les entablements. Ils sont percés d’un arc égal en dimension aux arcs latéraux du milieu, et divisés par trois entre-colonnements. Leurs trois angles sont surmontés de trois gros mascarons ; deux statues décorent leur clair-étage. Ces pavillons sont reliés au fronton central par deux galeries.

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Le chapiteau ionique d’un pilastre cannelé de la façade principale

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

Les arcs et toute la façade sont subdivisés, au rez-de-chaussée, par de nombreuses ouvertures ; et pour en faciliter l’accès, les piliers formant points d’appui se présentent arrondis en colonnes engagées. Sept entre-colonnements conduisent au rez-de-chaussée, aux salles de départ et d’arrivée. Au-dessus règne un étage percé d’arcades, divisé par des colonnes et destiné aux services administratifs.

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La façade latérale de la gare du Nord

(suite de l’article du Magasin pittoresque)

La façade latérale se lie au pavillon de gauche ; elle se présente comme un vaste portique formé par des pilastres de la même ordonnance, mais plus simples que les colonnes de la façade principale, et par deux larges entrées à arcades. Elle se développe le long d’une cour en face des bâtiments d’administration, qui méritent d’être regardés. Nous avons compté, dans cet hôtel gigantesque, quatre étages, trois pavillons, six grandes portes Louis XV ornées, deux cent dix fenêtres de face, dont seize mansardées. L’aspect en est monumental sans être trop sévère.

En entrant dans la salle des Pas-Perdus, on est frappé de sa longueur, qui la rend étroite. Elle ne doit pas mesurer moins de 80 mètres sur 9 environ. Ses vingt-six travées, auxquelles correspondent vingt-six larges fenêtres, contiennent les salles d’attente, les bureaux pour la distribution des billets, les correspondances, les renseignements, et des bibliothèques où nous avons en vain espéré rencontrer quelque notice sur la Gare. Au-dessus des bureaux, de grandes baies carrées, à vingt carreaux chaque, laissent voir les cintres qui soutiennent les murs de la halle. Au fond de la galerie est une horloge, et derrière, l’attirail de la petite vitesse. Dans les coins, on entrevoit d’étroits escaliers tournants ; le péristyle de l’entrée méridionale est soutenu par plusieurs colonnes cannelées sur grands piédestaux à hauteur d’homme. Tous les pilastres ont des bases de même dimension, à deux ressauts, mais dont la faible saillie ne dépasse guère l’épaisseur d’une plinthe ordinaire. Toutes les surfaces sont sobres, sans ornements, sans cannelures. Les plafonds, de fer, soutenus par des poutres transversales, saillantes, s’appuient sur de grandes consoles appliquées à une corniche plate et effacée (…).

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Le détail d’un chapiteau composite

(suite et fin de l’article du Magasin pittoresque)

Au mur de la galerie qui circule derrière la grande façade, sont accolés les bureaux pour le service de la banlieue. Une vilaine cloison coupe cette galerie en deux et sépare le côté des départs du côté des arrivées. Un mot sur la halle, et notre description est terminée : elle a une largeur de 70 mètres, presque quadruple de celle de la rue de la Paix. Son immense et unique toiture vitrée, dont l’angle est indiqué par le fronton central, s’appuie sur plusieurs rangées de légères colonnes en fonte. C’est le véritable temple de la vapeur »

(« La Gare du Nord », Le Magasin pittoresque, 1866, pp. 97-98)

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Vue de la halle, vers le péristyle d’entrée

D’après l’article du Magasin pittoresque, « on ne voyait [à l'origine] que deux couleurs, le blanc de la pierre et le sang-de-bœuf des peintures ». La structure métallique de la gare du Nord est désormais couverte d’une peinture bleu-vert.

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Les voies de la gare du Nord, vues du boulevard de la Chapelle

Depuis le boulevard de la Chapelle, le passant peut contempler les voies ferrées de la gare du Nord qui ont la particularité de serpenter aux abords de la halle métallique.

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